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l’Étranger au Théâtre 14

D'après Albert Camus
Adaptation de Benoit Verhaert et Frédéric Topart
 

L'EtrangerL’adaptation au ‘Théâtre 14’ de l’Étranger par Benoit Verhaert et Frédéric Topard et sa mise en scène par le même Benoit Verhaert nous offrent une lecture du texte d’Albert Camus efficace et tracée de grandes lignes claires. Elles nous ouvrent de nouvelles brèches dans la compréhension de ce roman sur lequel, déjà, tant de générations se sont penchées pour le plaisir de sa lecture et de sa relecture ou pour potasser leurs épreuves de philosophie.

L’accent est mis sur l’étrangeté de Meursault insensible à la mort de sa mère tout autant qu’à l’amour profond qu’une jeune fille veut lui offrir et également devant d’autres détails des simples rapports sociaux. Une insensibilité qui effleure les symptômes de l’autisme si nous n’avions pas la dernière scène où le personnage tente enfin d’expliquer et de justifier l’injustifiable. Dernière scène où il nous transmet des sentiments bien humains et dépourvus de désaffection : Alors, je ne sais pourquoi, il y a quelque chose qui a crevé en moi. Je me suis mis à crier à plein gosier et je l’ai insulté et je lui ai dit de ne pas me prier… Aucune de ses certitudes ne valait un cheveu de femme. Il n’était même pas sûr d’être en vie puisqu’il vivait comme un mort. Moi, j’avais l’air d’avoir les mains vides. Mais j’étais sûr de ma vie et de cette mort qui allait venir.

Les interprètes de cette adaptation sont convaincants dans leur rôle : Stéphane Pirard en Meursault lunaire rédigeant une lettre pour le compte d’un ami (entre guillemets), roucoulant avec une amante occasionnelle ou marchant en plein soleil sur une plage avec la même blanche désinvolture ; Benoit Verhaert interprétant tour à tour l’ami, le juge, l’avocat, l’aumônier en passant avec facilité d’un registre à l’autre et Lormelle Merdrignac dans la fraîcheur de son rôle d’amoureuse prise au pièce de l’incompréhensible.

Ces trois voix nous enchantent et illuminent le texte camuesque.

Les lecteurs de l’écrivain Emmanuel Bove (1998-1945) ont souvent prétendu que le personnage de ses romans, ce personnage jamais bien ancré dans la réalité et incapable du désir même d’échapper à son triste destin (voir Mes Amis, Armand, etc.), pouvait bien être l’ancêtre de Meursault. Je n’ai pu m’empêcher en suivant la trame de l’Étranger au Théâtre 14 de penser à ce cousinage.

En cette période un peu trouble où nous avons de moins en moins d’arme devant la faillite d’une société juste et sans faille, les réflexions dans lesquelles nous mènent ce spectacle ne peuvent qu’être une belle bouffée d’oxygène pour nos neurones déroutés. 

 

David Nahmias (1/2015)

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Théâtre 14 
20, avenue Marc Sangnier
75014 Paris
Réservations : 01 45 45 49 77 

Benoit Verhaert et Stéphane Pirard

 


Lormelle Merdrignac et Stéphane Pirard 

Camus L'Etranger